Aujourd’hui, je vous propose une immersion dans notre « métier » actuel de boulanger, en vous proposant de faire votre pain votre levain.

Pour faire du pain au levain, il faut déjà du levain. Pour faire votre levain, il faut prévoir 5 jours. On s’y prend maintenant, et la fin de la recette viendra donc d’ici 5 jours 😉

 

Qu’est-ce que c’est quoi le levain ?

On parle beaucoup de levain en ce moment. Mais c’est quoi exactement le levain ? Pour l’expliquer, revenons aux bases du pain. 

Le pain, c’est un mélange d’eau, de sel, de farine et d’agent levant.

Le sel sert à donner le goût, améliore la structure, influence la couleur de la croûte, ralentit le blanchissement de la pâte et améliore la conservation.

La farine est généralement une farine de blé, mais cela peut-être aussi du sarrasin, du seigle, du maïs… Ou encore de l’épeautre, qui n’est qu’une variété particulière de blé. Certaines farines sont « panifiables », c’est-à-dire qu’elles contiennent du gluten, qui s’organise en réseaux dans la pâte, une sorte de glu collante qui va permettre de piéger les gaz, et donc de former des bulles. Si le blé est panifiable, le seigle l’est beaucoup moins par exemple.

L’agent levant est soit une levure de boulanger, soit un levain. Le rôle de l’agent levant, est de générer du gaz carbonique qui sera ensuite piégé dans les réseaux de gluten cuit, formant ainsi les bulles du pain qui le rendent si moelleux. Là où vous utilisez, chez vous, des levures chimiques (généralement du bicarbonate de soude qui génère du gaz en présence d’eau) les boulangers utilisent des organismes vivants : les fameuses « levures« , de microscopiques champignons. La levure de boulanger est composée exclusivement de levures, là où le levain va être un mélange de levures et de bactéries

On comprend ainsi l’indispensable triplette « eau-farine-levain » : le levain digère l’amidon de la farine avec l’eau, et génère au passage du gaz qui sera piégé dans le gluten. On comprend alors aisément que le pain ne peut être fait qu’avec des céréales panifiables, c’est-à-dire qui contiennent un minimum de gluten, au risque sinon d’obtenir une brique compacte plutôt qu’un pain aéré.

Le levain, contrairement aux levures pures, va induire certaines spécificités du pain au levain : un temps de levée plus long, des bulles moins homogènes, un résultat moins certain, et une acidité plus forte de la pâte, propre au milieu bactérien… Mais c’est aussi l’assurance d’une mie plus souple, d’une meilleure conservation du pain, et surtout d’un pain plus digeste, car les gluten seront prémâchés par les bactéries (ce dont les levures sont bien incapables).

Alors, prêts à faire votre levain ?

 

Faites votre levain(-chef) !

Quand on sait que la grande majorité des boulangers utilisent de la levure, on se dit que le levain doit être quelque chose de mystérieux, dur à obtenir, ou trop cher… Que nenni, le levain est une simple fermentation d’eau et farine. Si les boulangers le boudent, c’est à cause de son côté capricieux : au-delà de son résultat moins « sûr » que la levure, un levain doit être nourrit régulièrement. Autrement dit : si vous faites du pain 2 fois par an, préférez la levure. En revanche, si vous souhaitez faire une fournée par semaine, le levain est fait pour vous ! 

Allez, on s’y colle. Les ingrédients sont simples : 

  • De la farine de blé complète (T110) de préférence bio
  • Une bouteille d’eau minérale

Certains sites conseillent de mettre également du sel. Ce n’est pas utile : à part ralentir la propagation des bactéries, le sel n’apportera rien. D’autres sites proposent de laisser fermenter le mélange initial sans jamais y toucher… C’est inutile aussi : dès qu’il aura fini de digérer les sucres de la farine, le levain va être « affamé » et se mettra en veille…!

Bref, maintenant, le principe est simple : chaque jour, vous allez « nourrir » votre levain avec le même poids d’eau et de farine, en doublant systématiquement les poids apporté. Allez, on vous donne le détail !

Jour 1

Dans un pot en verre, mélangez 10 grammes de farine avec 10 grammes d’eau minérale. Le mélange doit être homogène. Recouvrez alors le bocal d’un tissu, et laissez-le dans une pièce assez chaude.

Jour 2

Ajoutez à votre levain 20 grammes de farine, et 20 grammes d’eau minérale. 

Jour 3

Ajoutez à votre levain 40 grammes de farine, et 40 grammes d’eau minérale. 

Si le récipient devient trop petit, prenez-en un plus grand 😉

Jour 4

Ajoutez à votre levain 80 grammes de farine, et 80 grammes d’eau minérale. 

Vous devriez commencer à sentir des notes aromatiques : une odeur de yaourt, de bière, ou de fruit… Personnellement le notre sentait la poire ! C’est normal.

Vous pouvez aussi commencer à observer des bulles qui percent la surface, et une consistance un peu « filandreuse ». C’est normal.

En revanche, si votre levain sent le moisi, c’est mauvais signe… 

Jour 5

Ajoutez à votre levain 160 grammes de farine, et 160 grammes d’eau minérale. 

Vous avez à présent un levain de 620 grammes environ.

 

Jour 6 : et ensuite ?

Et voilà, votre levain est prêt à l’emploi ! Félicitations, vous avez votre premier (ou pas) levain-chef. C’est-à-dire la souche de base de votre levain, qui vous servira à faire votre premier pain ! Mais votre souche de levain est jeune, très jeune… Certains boulangers utilisent des levains qui ont plus de 20 ou 30 ans ! Le votre n’a que… 5 jours ! Il faut maintenant faire du  pain avec, de manière à le rôder. Il va s’affirmer, se stabiliser, et d’ici un mois ou deux, il vous donnera des résultats probants !

Car maintenant, il s’agit de ne pas le perdre, ce levain ! Chaque fois que vous ferez du pain avec, vous aurez besoin d’environ 250g de levain pour faire 1,2 kg de pâte… Mais attention, avant d’enfourner, il faudra prélever 100g de pâte à pain qui seront les 100g de levain-chef que vous utiliserez pour vos pains suivants !

Aussi, vous verrez, quand nous voudrons faire 1 kg de pain, nous prévoirons donc 1,3 kg de pâte dont 100g seront notre levain-chef !

Bref, votre levain est vivant, et comme tous les êtres vivants, il doit manger pour vivre. Le levain-chef doit être conservé au frigo pour le ralentir, et nourri régulièrement, environ 1 fois par semaine minimum, au risque sinon de tourner et perdre son efficacité. Aussi, tel un animal de compagnie, si vous partez en vacances, demandez à un ami de venir le nourrir, ou bien déshydratez ou congelez-le… 

Mais ça aussi, on vous en reparlera 😉